J’apprécie la facilité avec laquelle tu parles de révolution comme facteur de progrès, cela me rappelle les révolutions scientifiques de Thomas Kuhn dans la perspective d’un changement paradigmatique, changement lié à une crise au niveau de la communauté scientifique où une théorie scientifique ne tient, c’est-à-dire, ne résout plus les problèmes ou ne donne plus des solutions à des problèmes de la vie…D’ailleurs, il est curieux de constater que Thomas Kuhn assimile les révolutions scientifiques aux révolutions politiques : les révolutions politiques commencent par le sentiment croissant, parfois restreint à une fraction de la communauté politique, que les institutions existantes ont cessé de répondre d’une manière adéquate aux problèmes posés par un environnement qu’elles ont contribué à créer. De même manière, les révolutions scientifiques commencent avec le sentiment croissant, souvent restreint à une petite fraction de la communauté scientifique, qu’un paradigme a cessé de fonctionner de manière satisfaisante pour l’exploitation d’un aspect de la nature sur lequel ce même paradigme a antérieurement dirigé les recherches. Cependant, dans le développement politique comme dans celui des sciences, comme l’observe Kuhn, « le sentiment d’un fonctionnement défectueux, susceptible d’aboutir à une crise, est la condition indispensable des révolutions ». Concernant la relation entre le progrès et la révolution, Thomas Kuhn dit : « Cette fois encore, il est très instructif de nous demander si le résultat d’une révolution pourrait être quelque chose d’autre. Celle-ci se termine toujours par la victoire totale de l’un des deux camps opposés. Quel groupe dira jamais que le résultat de sa victoire n’a pas été vraiment un progrès ? Ce serait pour ainsi dire admettre qu’il avait tort et ses adversaires raison. Pour lui, tout au moins, il faut que le résultat de la révolution soit un progrès ».
Père Eric Ndjulu, SJ. Philosophe et homme de science.
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